mercredi 5 septembre 2012

Mon roman. 1ère partie

Plus jamais l’herbe ne sera aussi verte...

Un roman de jean Masbou

…Tranches de la vie d’un gus pas tout à fait dans les

rails !

Je croyais que, comme mes géniteurs, je pourrais finir
ma vie debout. Ce n’est plus le cas maintenant, alors,
même si je regrette d’avoir tiré à la loterie de la vie un
ticket pas fameux, je ne peux rien y changer !
C’est pour un tas de bonnes raisons que je fréquente depuis
longtemps le milieu médical, non par plaisir mais par obligation
et j’ai donc été amené à absorber des quantités de pilules,
gélules, sachets, des drogues, plus ou moins dangereuses, qui
ont fini par achever mes reins, un résultat final assez peu
réconfortant?
Même si la médecine et son cortège de bons docteurs est un
tissus d’imperfection, comment s’en passer ? De toute façon je
n’ai pas de compte, à régler avec cet étonnant corps médical,
ou l’on peut rencontrer toutes sortes de fats, de bellâtres,
d’hommes et de femmes plus ou moins agréables, des chics
types aussi, échantillons que l’on peut retrouver, sans
beaucoup de peine, dans les autres professions. Il semble en
effet évident que sont rassemblés dans le corps médical de
chez nous une grande variété de personnages, qu’il est
conseillé d’éviter lorsque l’opportunité nous en est encore
offerte!
Comme notre destin est impénétrable et tracé à notre insu
nous croisons finalement des praticiens plus ou moins
dangereux dans l'incohérence la plus totale!
Si je suis arrivé en dialyse, c’est bien en marche arrière même
si je n’ai jamais accordé une confiance aveugle aux sorciers que
le grand ordonnateur a placés sur ma route ! Au hasard de mes
rencontres, si je tombais sur un praticien éclairé, qui me
déclarait tout de go: “je vais vous guérir!” j’étais
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immédiatement envahi par une grande méfiance surtout si la
liste des médicaments prescrits était impressionnante. Sans
doute que cette réaction de prudence venait du fait que j’avais
vu ma brave mère absorber des tonnes de médicaments divers,
des pilules de toutes les couleurs et de toutes les tailles qui ont
soigné un nombre incalculable de maladies mais qui du fait de
sa grande résistance n’ont pu l’achever avant son 88
anniversaire, performance déjà précédemment établie par son
père, donc mon grand-père. L’Edouard, lui, par contre, n’avait
jamais touché aux médicaments et a finalement été emporté
par une maladie rénale?
C’est petit à petit que mes problèmes de santé ont compliqué
mon quotidien et depuis que je ne peux plus gagner ma
chambre à l’étage j’ai établi mes quartiers dans ma datcha
informatique ou un lit médicalisé a été installé.
Ce soir là je ne me doutais pas qu’une fois allongé j’allais
ressentir une douleur, une sorte de brûlure, dans la poitrine.
Mon assistance respiratoire normalement bienfaisante ne
m’aidait plus du tout et je compris que j’avais un problème.
Mon épouse décida, de joindre le médecin de garde. Je vis,
soudain, débarquer dans mon minuscule chez moi une équipe
d’ambulanciers qui m'annoncèrent l’arrivée du médecin du
SAMU. Les ambulanciers cédèrent rapidement la place au
toubib qui me posa alors tout un tas de questions comme dans
« URGENCE » le feuilleton de la TV. Rapidement je me
retrouvais transféré dans l’ambulance toujours concentré sur
ma respiration. En route vers l'hôpital intercommunal dans un
manque de confort total du, sans doute à l’état de la voirie de
notre bonne ville. La distance bien que courte me parut longue
et fut bien secouée! A l’atterrissage je me suis retrouvé dans
une sorte de hall et du brancard je fus transféré sur un lit, dans
un décor mal défini Je constatais, que ma douleur avait presque
disparue, alors mon inquiétude se dissipa .Une jeune femme
médecin, de type énergique, me soumit a une ne batterie
d’examens qui durèrent… longtemps. Enfin l’on m'annonça
qu’un lit m’attendait en cardiographie.
Après une promenade dans des couloirs déserts j’atterrissais
dans une chambre avenante ou l’on m’abandonna.
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Après cette série d’aventures j’ai, tout de même, eu un peu de
mal à trouver le sommeil!
Au réveil mes douleurs avaient totalement disparu mais je
découvrais, que j’étais bardé d’un paquet d’électrodes, reliées à
un volumineux boîtier. J’étais câblé à l’ancienne façon “Terre
Neuvas” et bloqué dans mon lit par une perfusion. A intervalle
régulier le contrôleur de tension déclenchait son alarme en
créant un désagréable climat de stress !
Mon week-end ne fut pas paradisiaque, aussi lorsque le lundi
matin j’appris que le chef de service, était à son poste je lui
adressais un SMS ainsi libellé: «Je n’ai violé personne et
pourtant je suis affublé d’un collier électronique”.
Peut de temps après cet homme sympathique vint me rendre
visite, câblage et perfusion me furent retiré. J’étais enfin libre
de mes mouvements, et ma sortie programmée avec
l’assistance très efficace de Céline la benjamine de mes filles.
De retour à la maison avec une liste de médicaments assez
impressionnante!
C’est avec un grand plaisir je retrouve les miens regroupés
autour de “Mamaia” et de nos chats dont l’équipe actuelle est
composée de Yoyo le chef, Rounet le sous-chef, Mr Minou et ma
grande amie Clarence! L’équipe au complet et en bonne forme
apparente, a ronronné en chœur pour m’accueillir dignement
Des chats j’en ai toujours eu autour de moi, ils auront
accompagné mon passage ici bas et c’est vrai, j’ai la
sensation d’avoir toujours habité chez eux !
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Il y a toujours un point de départ…
Pour le zombi, si peu scientifique que je suis, le premier être
vivant identifié n’était sans doute qu’un sexe associé à un
minuscule embryon cérébral. Mais qu’importe que cela
corresponde ou pas à la réalité. Ce fut de toute façon le point
de départ d’une grande aventure.
Donc, moi, le Jean qui, un jour ensoleillé de juin 1927, fit une
entrée discrète dans notre monde, fils de Marie-Louise et de
Marcel, un couple de trentenaire comblé par mon arrivée à bon
port, on me l’a affirmé mais je ne me souviens de rien! On m’a
raconté aussi que j’avais l’air un peu désemparé lors de ce
premier contact avec la réalité de la condition humaine lors de
ce moment, qualifié pour eux et pour moi si important. Et dire
que je fus, immédiatement plongé, sans précaution excessive,
dans une bassine d’eau tiède ou m’attendait un énorme savon
de Marseille. En somme, une drôle, de première surprise pour
un gars qui depuis n’a pas beaucoup aimé l’eau?
Devenu au fil des années, un authentique insomniaque, qui à
l’approche d’anniversaires voit rêves et cauchemars animer
furieusement ses nuits. Croyez-moi, durant ces périodes mes
réveils ne sont pas toujours extrêmement sereins !
De plus, il y a une petite voix, de type aéroport,
particulièrement lancinante qui me rappelle que mon Marcel de
Père est parti dans sa 80e année et que je dois à mon tour
penser à préparer mon paquetage.
Une perspective pas vraiment réjouissante,mais j’ai conscience
que ma vie peut s’arrêter à tout moment, je le sais ! Par contre
ce que j’ignore c’est comment faire taire cette importune voix
qui perturbe mes nuits. !
Certaines nuits où je ne contrôle plus rien, défile dans ma tête
des pans entiers de ma vie au gré d’une fantaisiste mémoire.
Des épisodes marquants mais aussi des faits anodins qui ne
méritent pas de surcharger mon disque dur remontent à la
surface. Généralement ce ne sont pas les meilleurs moments de
ma vie qui défilent en accéléré !
Au palmarès de ces rediffusions figure mon entrée en
résistance, en culotte courte, à 17 ans et demi, suivie par cette
rencontre sanglante avec la division Das Reich.
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Qu’en reste-t-il aujourd’hui : une stèle à la croisée des chemins
de mon Quercy natal ou sont gravés dans le marbre les noms
de nos camarades malchanceux qui ont été tués bien
inutilement. Durant mes interminables nuits je contemple leurs
noms gravés sur le modeste monument. Comme j’ai un peu de
mal à revoir leur visage, cela me rend nerveux. Je vois, le nom
de mon copain André ainsi que le mien sur ce monument du
souvenir. Pourquoi ? Puisque ce jour là, ensemble, nous avons
échappé à la mort. Et c’est généralement à ce moment précis
qu’une douleur intense me fait sortir de mon cauchemar. Je
constate alors que je suis bien vivant mais pas pour autant
triomphant !
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En ce moment je navigue entre la maison et l'hôpital ou un
néphrologue s’intéresse à mon état!
Cela fait déjà un long moment, que ce personnage
énigmatique, me préparait à faire le grand saut en dialyse! J’ai
eu le choix entre mourir prochainement et survivre encore un
peu sous assistance. J’ai eu, la faiblesse d’opter pour une
prolongation sans assurance!
C’est comme çà qu’aujourd’hui je me retrouve patient dans
cette grande usine qui porte pour nom : Hôpital Jacques M…d.
Je ne suis pas tout à fait à la dérive mais cela ne m’empêche
pas de gamberger grave, des pensées très moroses me
perturbent, avant de faire mon entrée dans le centre
opérationnel de la dialyse ou l’on va me doter, dans des
conditions proches de la médecine de brousse, d’un
branchement, qualifié de provisoire, permettant de me
raccorder à un robot très dernier cri.
Une arrivée discrète dans le sanctuaire?
Premier contact surprenant, j’entre en effet dans un lieu
aveugle, ou les technologies modernes côtoient le désuet. Dans
chacune des petites cellules que comporte le local trône une
sorte de machine à sous qui égrène des sons plus ou moins
joyeux mais sans jamais cracher le moindre jeton. En
découvrant pour la première fois le centre de dialyse je suis
véritablement intrigué et pourquoi ne pas l’avouer un peu
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inquiet. J’observe attentivement les déplacements de tous les
acteurs qui coopèrent à la bonne marche de cette boutique
insolite ou chaque intervenant semblent accaparé par des
protocoles complexes. J’occupe mon temps en assistant depuis
mon lit au spectacle qui m’est offert, dans ce lieu, avant que
mon tour arrive.
Lors de mon arrivée dans le centre J’ai découvert la fournée du
matin de ces sinistrés des reins qui viennent confier, leur sang
pour épuration à des robots assez mystérieux.
Comme les jockeys les aspirants dialysés sont pesés à leur
arrivée soit directement avec leur lit ou alors sur le fauteuil
balance qui trône dans l’entrée. Une opération réalisée, tant par
les ambulanciers que par le personnel du centre. Cela se passe
dans une ambiance assez bon enfant. Première constatation le
plus grand nombre des patients présents à la pesée sont, à
mobilité réduite. Tous ou presque semblent être ici comme chez
eux, ils aident de leur mieux les intervenants qui les
débarrassent de leurs chaussures et de quelques éléments
vestimentaires avant la pesée. Je constate aussi à regret que
c’est le monde du silence, les patients ne communiquent pas
beaucoup, leurs échanges sont à la fois courts et rares ! A la fin
cette première étape, c’est le transfert jusqu'à la petite niche
qui est attribuée à chacun pour la séance du jour. Confort
rudimentaire offert par des locaux en fin de vie -eux aussi- ou
tout semble malgré tout assez fonctionnels mais c’est tout de
même loin d’être Byzance ! Ces niches peuvent êtres mono ou
biplaces et accueillir soit un lit et un robot soit deux lits et deux
robots, au final le qualificatif qui caractérise le mieux
l’ambiance qui règne dans ce lieu est bien : sérieuse. Je suis
maintenant installé prêt à être mis en relation avec la machine,
après la pose, du fameux branchement provisoire prévu pour
seulement deux séances. Cette opération ne se révèle pas
franchement agréable.
Le robot, lui semble tout guilleret et prêt à accueillir mon sang
pour le débarrasser des impuretés que mes reins défaillants
n’ont pas pu éliminer. Cette machine qui trône non loin de mon
lit attire, c’est vrai ma curiosité. Elle émet des sons divers
qu’elle égrène à intervalle plus ou moins régulier. Son grand
écran tactile, tapoté par l’opératrice qui y introduit tous les
éléments utiles à la séance qui ne va plus tarder à débuter.
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Je suis branché donc totalement dépendant du robot qui épure
déjà mon sang et affiche à l’écran de très nombreux
paramètres Et tout en haut de la machine un voyant vert
scintille, mais pour qu’elle espérance?
Allongé sur mon lit je scrute le local qui n’est pas si grand, et
dont l’air vieillot me surprend. Je suis maintenant
complètement seul dans en tête à tête avec la machine en effet
tous les intervenants se sont retirés les uns après les autres.
. En premier les deux toubibs qui ont réalisé le branchement et
qui avaient été rejoints par mon néphrologue venu me faire une
visite de courtoisie, à laquelle j’ai été sensible. La dernière à
quitter les lieux, après m’avoir parlé abondamment de mon
aventure, fut la technicienne, celle qui dompte le robot, sans
utiliser de fouet.
Je guette tous les bruits émis par ce concentré de technologie
un peu inquiétant. Pour créer l’ambiance, à intervalle régulier le
brassard qui enserre mon bras droit se gonfle pour le contrôle
de ma tension. Comme elle est élevée l’alerte se déclenche
souvent et avant qu'un intervenant ne vienne contrôler le
temps semble long. Cette première séance ne durera que deux
heure, puis celle de demain trois heures et après cela durera
quatre heures : c’est long, pas amusant mais comme je n’ai pas
le choix je dois bien accepter.
A quoi ai-je pensé durant cette première séance, en fait à pas
grand chose, tout paraissait peu clair dans ma pauvre tête, je
promenais mon regard dans ce local insolite, avec sa cloison en
planches peintes et son confort très minimaliste. Suspendu
dans ce décor un écran de télévision, est resté tout noir durant
toute la durée de la séance. Je me sentais un peu perdu et
pourquoi le cacher pas totalement rassuré. Pourtant lorsque
l’alerte était déclenchée cela me valait la visite fugitive d’un
membre de l’équipe ce qui créait une diversion. Je glissais
finalement dans une sorte de torpeur mes amis les chats me
manquent...
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