mercredi 7 novembre 2007

Une enfance heureuse...


Pensées moroses mais finalement pas si triste que çà !

J'appartiens, sans aucun doute possible, à la catégorie des deux pattes la plus répandue, celle qui n'est et ne sera jamais, tout à fait, dans la lumière des projecteurs et qui en fin de parcours, laisse en fait, assez peu de traces tangibles de son passage sur notre généreuse planète !

Constatation ni très positive, ni très exceptionnelle puisque le plus grand nombre des bipèdes qui depuis cro-magnon n'en finissent pas de se proclamer beaux et supérieurs appartiennent à la lignée de l'homo sapiens dans toute sa splendeur touchante!

Les hommes de ma génération ont connu des fortunes très diverses en traversant une tranche assez chaotique de notre histoire, parfois assez violente. Au départ, tous ou presque ont baigné dans une éducation judéo-chrétienne qui a quelquefois influencé le cours de leur vie d'homme. Pour moi qui suis arrivé dans une famille ou la mère avait été une enfant de Marie et ou le Père bouffait du curé les séquelles ont été finalement assez légères.

Il y a eu, tout de même, des épisodes hauts en couleurs.

Je me souviens, comme si c'était hier, de la visite que ma mère rendit à l'aumônier de mon Lycée, à la demande de cet important personnage. On bénéficiait d'un printemps lumineux et ma mère se présenta dans sa jolie robe bleue à fleurs violette qui lui allait bien et qui soulignait gentiment ses avantages, coiffée d'un ravissant petit bibi tout aussi fleuri qui était du meilleur effet. Lors de son apparition à la porte de la salle ou notre aumônier, taillé à la serpe comme un pilier de rugby, nous dispensait de façon très physique l'amour de notre prochain, je constatais immédiatement que le colosse en soutane avait l’œil allumé immédiatement. Il ne se gênait pas, le moins du monde, pour détailler sans fausse pudeur les atouts majeurs de ma gentille mère. Un instant embarrassée, ses joues s'empourprèrent. Elle était timide mais sans excès et elle pouvait avoir des réactions étonnantes et même se révéler excellente négociatrice ce qu'elle confirma, une fois encore, ce jour là. L'aumônier qui était un triomphant mit fin au silence et d'une voix qui résonnait dans la classe déclara, devant tous mes copains, que j'étais complètement nul, que je ne connaissais pas un seul épisode de l'histoire religieuse et circonstance aggravante il prétendit que mon attitude était provocatrice. Content de lui, il s'arrêta pour voir l'effet que son discours d'accueil avait eu sur ma mère, puis sans lui laisser le temps de répondre il lui asséna sa conclusion: votre effronté de fils ne fera pas sa première communion cette année!

Ma mère resta silencieuse, elle était tout à fait calme mais son visage était très empourpré, beaucoup plus que lors de l'épisode précédent ou l’œil émoustillé du prélat la déshabillait virtuellement. Elle se mit à parler, très doucement, d'une voix claire mais sèche pour lui asséner quelques vérités premières qu'il encaissa sans broncher et avant qu'il ne puisse trouver de bons arguments pour sa réponse elle lui servit un deuxième envoi, encore plus corsé que le premier, lui rappelant que l'inquisition était d'un autre âge et que rien ne l'autorisait à pratiquer des châtiments corporels à l'encontre de jeunes enfants. Moi son fils, il l'avait giflé méchamment devant toute la classe avec une certaine violence. Inacceptable lui lança-t-elle! Puis calmement elle parla d'une rencontre possible avec le Proviseur puis, sans ciller, évoqua dans la foulée la possibilité du dépôt d'une plainte à qui de droit. Et ce fut au tour de l'athlétique prélat de devenir cramoisi et de friser l'apoplexie. il fit un peu de cinéma mais se calma rapidement en y laissant beaucoup de sa superbe ! Ce fut le vrai tournant de leur explication. Le dialogue reprit, mais cette fois dans le calme car l'homme d'église qui avait flairé le danger se révéla d'un seul coup étonnamment conciliant. Il expliqua alors à ma mère que s'il m'avait gratifié d'une "pichenette" c'est parce que je l'avais humilié en répondant à sa question "QUI EST DIEU," par la chansonnette "Dieu est un petit bonhomme habillé de bleu qui fume sa pipe au coin du feu". Ma mère sourit alors à l'abbé et lui dit : que je sache vous pratiquez vous aussi un humour capable de rendre la vie plus supportable et elle renchérit : je ne pense pas que cette petite incartade méritait d'être traitée de la sorte! Vous m'attristez beaucoup M. l'abbé! Le curé pataugeait, il n'avait pas l'habitude d'être traité de la sorte et ma mère en profitait pour lui placer quelques banderilles supplémentaires du genre : "Mon mari n'est pas homme d'église mais moi je suis soucieuse que mon fils soit élevé dans notre religion, si cette année mon fils est rejeté, il semble certain que l'année prochaine il ne revienne pas au catéchisme!".

Et voila comment je me suis retrouvé en cours de rattrapage de bondieuserie. pas pour sauver mon éducation religieuse mais pour simplement permettre à une fête de famille, qui impliquait un énorme gueuleton particulièrement bien arrosé, de pouvoir se dérouler normalement.

Et toujours pour faire plaisir à ma gentille mère spécialiste en sauvetages inespérés qui, de plus, avait bien su faire rire mes copains j'ingurgitais, sans beaucoup d'enthousiasme le programme imposé jusqu'à ma confirmation ou j'ai traditionnellement eu droit à une tapette sur la joue administrée par une huile locale notre Monseigneur l'évêque à laquelle s'ajouta par surprise la bouffe dont mon brave homme de Père me gratifia à la fin du repas en raison de mon manque de sobriété unanimement constaté!

Un sacré parcours croyez-moi mais tout de même semé de pas mal d'embûches !