jeudi 4 août 2011

Je flotte, je coule, je suis observé, je suis aux abonnés absents ?

Si je suis arrivé en dialyse, c’est bien en marche arrière, je n’ai jamais accordé, une confiance aveugle en ces sortes de sorciers, appelés aussi médecin, que le grand ordonnateur a placés sur ma route et si, de plus, ce “certifié”, me déclarait d'entrée: “ ne vous en faites pas, je vais vous guérir!” ma méfiance était en alerte, surtout si la liste des médicaments prescrits était impressionnante. Sans doute cette réaction de prudence vient du fait que j’avais vu ma brave mère absorber des tonnes de médicaments divers, des pilules de toutes les couleurs et de toutes les tailles qui ont soigné un nombre incalculable de maladies imaginaires mais il devait y avoir dans ce tas pas mal de placebos car elle a tout de même bien résisté, au moins, jusqu'à son 88ème anniversaire. Comme l’avait fait son père qui était aussi mon grand-père, cet Edouard qui lui, n’a jamais touché sérieusement aux médicaments!

Mon arrivée discrète dans le sanctuaire de la dialyse?

Impression surprenante, celle d’entrer dans un lieu déroutant, aveugle ou les technologies modernes voisinent avec le désuet. Dans chacune des petites cellules que comporte ce local trône une sorte de machine à sous qui égrène des sons plus ou moins joyeux mais sans jamais cracher le moindre jeton. En découvrant pour la première fois ce lieu je suis intrigué, mais aussi, pourquoi ne pas l’avouer, l'inquiétude n’est pas bien loin non plus. J’observe les déplacements de tous ces gens qui coopèrent à la bonne marche de cette boutique insolite ou tous les intervenants semblent accaparés par des protocoles complexes. Et chez eux pas la moindre trace de fébrilité, il flotte même une certaine sérénité.. J’observe le moindre mouvement, cela m’occupe avant que l’on me prenne en main. J’assiste en spectateur-acteur à l’arrivée de la fournée du matin de tous ces sinistrés des reins qui viennent confier, pour épuration, leur sang à de bons et gentils robots.

Comme les jockeys les aspirants à la dialyse sont pesés à leur arrivée soit directement avec leur lit ou sur le fauteuil balance qui trône dans l’entrée. Une opération basique opérée, tant par les ambulanciers que par le personnel du centre. Tout cela se passe dans une ambiance détendue, je remarque aussi que le plus grand nombre des patients présents sont à mobilité réduite. Tous ou presque paraissent confiants et facilitent de leur mieux les intervenants qui les débarrassent de leurs chaussures et de quelques éléments vestimentaires, avant la pesée. Mon tour arrive et après cette première étape, toujours en fauteuil je suis acheminé jusqu'à la petite niche qui m’est attribué pour cette première séance. Pas de luxe inutile, dans des locaux en fin de vie -eux aussi- ou tout parait tout de même net et fonctionnel ! Ces niches sont mono ou biplaces et accueillent soit un lit et un robot soit deux lits et deux robots. Me voila installé sur mon lit prêt à être branché pour la première fois après la pose, à l’ancienne, de ce fameux branchement prévu pour seulement deux séances .Opération somme tout basique mais pas franchement si facile et si agréable. Quant au robot, il est prêt et semble tout guilleret d’accueillir mon sang pour le débarrasser des impuretés que mes reins défaillants n’ont pas pu éliminer. Cette machine qui trône non loin de mon lit attire beaucoup ma curiosité. Elle émet des sons étonnants qu’elle égrène à intervalle plus ou moins régulier. Son grand écran tactile, tapoté par l’intervenante qui entre tous les éléments utiles à la séance, qui ne va plus tarder à débuter.

Ok! Je suis branché, je suis totalement dépendant du robot qui épure mon sang et affiche sur son écran de nombreux paramètres. Au sommet de la machine un voyant, au vert scintille, mais pour qu’elle espérance?

Allongé dans mon lit je scrute le local qui n’est pas bien grand et a un petit air vieillot, je suis seul dans cette niche car tous les intervenants ce sont retirés les uns après les autres. En premier les deux toubibs qui ont réalisé le branchement et que mon néphrologue avait rejoints pour me faire une visite de courtoisie à laquelle j’ai été sensible. La dernière à quitter les lieux, après m’avoir parlé abondamment de la suite des événements, fut la conductrice, celle qui dompte le robot sans fouet.

Je suis maintenant seul et je guette tous les bruits émis par cette machine un peu déroutante. A intervalle régulier le brassard qui enserre mon bras droit se gonfle pour réaliser le contrôle de ma tension. Comme elle est élevée l’alerte se déclenche et cela dure un peu avant qu'un intervenant ne vienne contrôler le phénomène. La première alerte m’a surpris mais rapidement je me suis adapté! Cette première séance ne durera que deux heure, demain trois heures et après quatre heures : c’est long, pas amusant mais comme je n’ai pas le choix je dois bien accepter.

Une alerte du robot me tire de ma torpeur, un coup d'œil sur l’écran de contrôle me rassure 30 minutes restent au compteur!

La fin de cette première séance arrive rapidement, je suis désolidarisé de la machine, je suis à nouveau un homme, presque libre, mais pas flambant. Vint la pesée et après une courte attente une équipe de brancardiers m'entraînèrent par couloirs et ascenseurs jusqu’à ma chambre du 6ième étage m’offrant la perspective de voir défiler des plafonds assez peu attrayants!

Anomalies, désespoir, le temps s’écoule avec une lenteur atroce à l'hôpital J. Monod! Tout cela est, à la fois, subjectif, réel et finalement totalement faux!

Mon silence ne vous paraitra plus si curieux ?

(à suivre)