En ce
moment j’ai un peu plus de mal à supporter la vie de reclus que m’impose mon
handicap. Une situation qu’aggrave aussi
l’état lamentable de la voirie de cette ville sympathique où j’ai échoué un peu
par hasard bien avant que mon corps ne me refuse les services les plus basiques !
Aujourd’hui
mon Quercy natal me manque comme la petite maison de mes grands parents
maternels dans cette vallée ou la rivière Lot a creusé son lit en laissant apparaître de magnifiques falaises.
A la fin de cette journée qui pour moi n’a pas
été particulièrement joyeuse, subitement il me revient en mémoire, l’histoire
d’une chèvre finissant sa vie attachée à un piquet.
Cette très belle chèvre qui portait le doux
nom de Louison était connue de tous les habitants du village car elle
alimentait souvent les conversations. En réalité, elle préférait les
légumes du potager contigu à l’herbe pourtant bien verte et d’excellente
qualité de l’enclos qui lui était assigné. Il ne se passait, donc, pas beaucoup
de temps entre ses incursions répétitives dans le potager voisin, en dépit de
la vigilance de son propriétaire, l’Armand qui surveillait la clôture
régulièrement. Mais la Louison qui était astucieuse, trouvait toujours le point
faible de cette sorte de barricade.
Un esprit tortueux aurait facilement pu croire
qu’elle prenait du plaisir à envenimer les relations entre le voisin et son
gentil propriétaire, qui après chacun de ses raids devait s’aplatir pour sauver
des relations compliquées.
Excédé de
voir ternir sa réputation en raison du comportement de sa chèvre, un peu folle,
il se décida à employer les grands moyens. Un matin il s’arma d’un pieu et
d’une masse et planta le pieu sous un arbre, y attacha une corde solide,
vérifia que Louison pouvait, durant la journée, trouver assez de nourriture tout
en profitant de l’ombre dispensé par ce magnifique cerisier, qui trônait au
centre de son enclos. Avant de quitter la Louison, il contrôla, une dernière fois,
que la longueur de la corde interdisait bien toute incursion dans le
potager du voisin !
Le premier jour la Louison fit la gueule à l’Armand
et mangea peu. Le jour suivant, il allongea quelque peu la corde. La situation sembla se
stabiliser, enfin, jusqu’à cette belle, mais fatale après midi, pleine de
notre soleil si généreux. Armand, qui
passait par là, n’en crut pas, tout d’abord ses yeux, mais il dut bien se
rendre à l’évidence, la Louison avait sectionné sa corde et gisait, affalée au
beau milieu d’un désastre total au milieu du potager du voisin!
·
Depuis ce triste jour ou la Louison est devenue,
une délinquante, je n’ai plus jamais retrouvé de Louison libre mais toujours
maintenue au bout d’une sa chaine métallique et dans le regard j’ai lu à chaque passage : « Tu as vu ce qu’ils ont osé me
faire ! » Moi, chaque fois, j’ai crié spontanément: libérez
Louison ! Libérez Louison, mais jusqu’à ce jour je n’ai
toujours été entendu !
·
Alors je compte sur vous tous, pour crier avec moi et très fort: Libérez LOUISON !
·
Libérez LOUISON !