Vendredi, jour
avec dialyse, pour moi, au Centre Hospitalier Jacques Monod. Les ambulanciers
sont, un peu en avance, mais c’est une équipe sympathique qui me prend en
charge, ils connaissent bien la maison, je suis embarqué sans problème et tout
ce passe dans la bonne humeur, en route vers ce centre installé dans une sorte
de blockhaus sans fenêtre. Le personnel est jeune mais attentionné, ce qui atténue,
sans les supprimer, un certain nombre d’inconvénients. Nous, les patients sommes
la matière première pour toutes sortes de blouses blanches, justificatifs de
leur gagne pain pour tout ce monde hospitalier qui est bien léger parfois !
A l’arrivée, pesée
avec mon brancard par les ambulanciers qui me roulent dans le sanctuaire, en
recherchant la place qui m’a été attribué afin de pouvoir m’installer dans mon
lit. Un frisson parcours le bas de mon dos, déjà rongé par la gratouille,
vais-je être placé au fond de la grotte ce qui me procurerait un vrai malaise.
Mais, apparemment, c’est mon jour de chance, mon lit est placé tout près de
l’entrée et comble du confort il est équipé d’une potence. Et, preuve complémentaire,
que c’est bien mon jour de chance, l’infirmière qui me prend en charge est l’une
des plus compétentes du service. C’est une vieille connaissance, je l’ai connu
à l’ancienne dialyse et elle est toujours à la fleur de l’âge, elle sait
intervenir quand le stress se pointe, elle sait aussi distribuer de la chaleur
humaine à bon escient. C’est, incontestablement mon jour de chance et je me
détends un peu. Toutefois, comme je fréquente ce service depuis longtemps, je
sais que la pioche n’est pas toujours bonne et rien n’étant acquis, je peux
connaître encore dans ce lieu des expériences pas tout à fait positives, même
peut-être, de vrais jours sombres ! Rien n’est parfait, la preuve aujourd’hui
jour de chance, j’ai eu droit à la télévision mais en étant privé de sons.
je choisis,
alors, les bras de Morphée, mais je suis en face d’un plafonnier qui m’aveugle,
preuve supplémentaire que ce local à bien été conçu par des nuls !
Je ne suis plus
là et tout à coup je me retrouve devant le passage à niveau qui jouxte une parcelle
qui contient le trésor de ma grand-mère : ses pruniers ! Mais je me rends
compte soudain que la cloche annonce le passage d’un train qui déboule à grands
fracas. Le monstre d’acier s’arrête devant moi et la vapeur qui m’entoure
trouble ma vision quand soudain la voix de mon père me rassure, « Monte
vite car je n’ai pas le droit de m’arrêter là » le monstre n’est pas
facile à escalader par des jambes encore courtes, mon père me tend la main et
je prends pieds sur le mastodonte pour la première fois. Je retrouve mon héros
la caquette visée sur sa tête la visière en arrière, des lunettes de pilote par-dessus.
Son compagnon en profite pour projeter quelques pelletées de charbon sur les flammes
de l’enfer. « Tu vois là c’est
la commande du sifflet que tu actionneras à notre entrée en gare ». La
bête cracha de la vapeur et le convoi s’ébranla dans un bruit de tonnerre .La
gare était presque là lorsque mon père me cria « Maintenant »
et j’actionnais le sifflet vigoureusement …J’étais heureux, mon père aussi !
C’était un baptême réussi ! Je me souviens de tout, comme çà s’était passé
hier, mais ne me demandez pas la date de cet événement et quel âge pouvais-bien
avoir. Je me souviens seulement que j’étais en culotte courte et que j’effectuais
un court séjour à Saint Martin Labouval chez mes grands parents maternel, un
petit village de la vallée du Lot que j’aime tant…Mon baptême ferroviaire à eu
lieu il y à bien longtemps sur la ligne du P.O Midi, qui serpentait dans notre
vallée de Cahors à Capdenac, qui à cette
époque était une base et même un nœud ferroviaire important ou opérait mon oncle,
qui n’était autre que le frère aîné de mon Marcel de père ! Ils furent
tous les deux mécaniciens de route durant l’épopée de la vapeur…Que c’est loin
tout çà…
La gratouille me
réveille et l’écran de mon écrémeuse n’est pas consultable mais mon infirmière
me rassure, plus que quelques minutes et je ne serais plus saucissonné comme
une chèvre attachée à un piquet et empêtrée dans sa chaîne…Quant au plafonnier
aveuglant, lui, l’on ne peut pas l’oublier, il restera comme çà jusqu’à la fin
de cette merveilleuse dialyse !